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  Premier happening anticaméras




La performance de Christian, un quasi-strip-tease, sous l'oeil des passants et surtout des caméras, pour interroger la notion de comportement suspect.(Photo DNA - Bernard Meyer)



   Quasi-strip-tease, confection de boucliers anticaméras, valse muette, le tout sous l'oeil de caméras du centre-ville : les membres d'un collectif anti-vidéosurveillance strasbourgeois ont multiplié hier les actions de sensibilisation originales et humoristiques.
 Une fois le panneau-slogan « Les caméras de surveillance sont une atteinte à vos libertés individuelles » accroché au mur, Christian, crâne rasé, piercings, yeux clairs, peut commencer son action, ce samedi 15 h 25, au bout de la Grand-Rue.
 Sur une scène délimitée par quelques bouts d'adhésif noir, le performer-militant se déshabille - il s'arrête au slip - et se rhabille à l'infini, sous l'oeil de deux des 80 caméras que compte le centre de Strasbourg. « Je veux d'abord qu'on m'enregistre. Je voudrais aussi que les gens se demandent comment la personne derrière la caméra peut juger que tel comportement est suspect ou pas », explique Christian.

« 1 m² de liberté »

 Les premiers passants s'arrêtent, intrigués, pour jeter un coup d'oeil au quasi-strip ou lire quelques-uns des documents accrochés au mur. La carte des caméras installées dans l'ellipse insulaire a retenu l'attention de Pascale, blouson, jupe et pantalon bleus. Elle peste : « Il y en a quand même beaucoup. On nous observe malgré nous, il n'y a pas l'échange du regard. On nous mate et ça me gêne ».
 Plus loin, à hauteur de la rue du Fossé-des-Tanneurs, Sébastien et deux acolytes « protègent » les badauds du regard d'une caméra boule à l'aide de « boucliers anticaméras » en carton, « 1 m² de liberté » écrit dessus. Pour Sébastien, cheveux longs, jeans, baskets, il s'agit notamment de dénoncer « cette logique du tout-sécuritaire. Et de rappeler que la videosurveillance, dont l'efficacité n'a jamais été prouvée, tient plus du gadget électoral ». Un passant trouve « qu'il faudrait mettre une caméra derrière chaque personne », mais la plupart des badauds accueillent l'action « avec le sourire », note Stéphane. Beaucoup découvrent l'ampleur du dispositif strasbourgeois. Certains s'en inquiètent.
 Planté devant Sabrina et ses ami(e)s qui, place Kléber, dansent au milieu d'une scène bricolée pour figurer un viseur de caméra, Jérôme, lui, explique aux manifestants : « Moi, qu'on me filme, ça ne me fait rien. Je viens de Lille, c'est pareil, il y a des caméras partout ».
 « C'est bien là, le problème », notait plus tôt Stéphane, lors de la préparation des actions : « Les gens se sont accoutumés ».



Manuel Plantin

© Dernières Nouvelles D'alsace, Dimanche 23 Mai 2004.
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